La mort de six femmes en l’espace d’une semaine au service de maternité de l’hôpital Hassan II d’Agadir a déclenché indignation et manifestations. Deux jours après, le ministre de la Santé et de la Protection sociale, Amine Tahraoui, s’est rendu sur place et a annoncé le limogeage du directeur de l’hôpital ainsi que de plusieurs responsables régionaux. La décision fait suite aux conclusions d’une commission d’enquête qui a mis en évidence des absences injustifiées du personnel, des ruptures fréquentes de médicaments et des équipements défaillants. Un nouveau scanner a été livré en urgence, l’ancien étant hors service.
Ce drame rappelle des scandales similaires. En novembre 2023, le détournement d’équipements à l’hôpital Ibn Baja de Taza avait conduit à l’arrestation du directeur et de dix autres personnes. En mars 2024, quatre chefs de service du CHU Ibn Sina de Rabat avaient été révoqués pour dysfonctionnements administratifs. En juin 2025, un rapport syndical dénonçait à nouveau des dérapages structurels et des soupçons de corruption au même centre. La région de Casablanca-Settat avait, elle aussi, remplacé plusieurs directeurs d’hôpitaux en mai 2025 pour mauvaise gestion.
Ces mesures ponctuelles mettent en lumière des problèmes structurels persistants. En 2024, le Maroc présentait un déficit de 97 566 professionnels de santé, dont 32 522 médecins et 65 044 infirmiers. La densité médicale est de 1,7 médecin pour 1 000 habitants, alors que les besoins sont estimés à 2,75 pour 1 000. L’émigration de 10 000 à 14 000 médecins aggravent la situation.
Le financement reste également insuffisant. Le Maroc consacre 2,2 % de son PIB aux dépenses de santé selon le tableau de bord de l’Afrique 2024 de l’Union africaine. La Cour des comptes, dans son rapport de 2022, constatait que la majorité des organes de contrôle et de gestion des hôpitaux n’avaient jamais été mis en place.
Les crises successives montrent les limites du simple remplacement des responsables. Les mesures ponctuelles ne garantissent pas une réforme durable, laissant planer des doutes sur l’accès équitable aux soins et la qualité de la prise en charge dans les hôpitaux publics.
Enfin, le contrôle du système reste insuffisant. Malgré l’existence sur le papier d’inspections générales, de conseils de surveillance et de services d’audit internes depuis 2017, le sous-effectif chronique, le manque de moyens et l’absence de suivi réel des recommandations limitent leur efficacité. La Cour des comptes rappelait en 2022 que ces structures étaient rarement opérationnelles.